mardi 1 mai 2012

Le plat qui se mange chaud.

Si la vengeance est le plat qui se mange froid, l'inspiration, dans notre domaine du dessin, est celui qui, pour moi, doit se manger chaud, voire brûlant.
Par inspiration j'entends "ce qui nous inspire, ce qui nous sert de modèle, les influences".
Ma plus grande influence graphique a longtemps été Hermann. J'ai beaucoup aimé et analysé Giraud, Derib, Walthéry, Loisel et bien d'autres depuis.
Avec le temps, je me rends compte que quant on est jeune dessinateur on a tendance à prendre son inspiration dans le mauvais sens. On s'inspire de ce que l'auteur fait : son dessin, sa narration, et le pire: son univers.
Certainement est-ce un parcours naturel, mais l'admiration qu'on a pour un auteur ne doit jamais nous faire oublier qui nous sommes. Je suis un fan inconditionnel du cinéma d'animation de Miyazaki et aussi de son manga "Nausicaä de la Vallée de Vent" qui pour moi est un chef d'œuvre. En somme, c'est la seule BD où je me moque qu'elle soit bien ou mal dessinée. J'adore le point de vue de Miyazaki sur le monde, sur l'aberration de la guerre, sur la magie de la nature; ses personnages sont toujours fascinants, ses méchants ont toujours de la profondeur... Mais c'est son univers à lui. Vouloir faire "du" Miyazaki ce serait malhonnête.

L'inspiration est un plat qui se mange brûlant car il faut se nourrir de ce que l'on aime ardemment et se brûler pour se remettre en question... Mais cette remise en question doit se faire par rapport à qui "nous" sommes nous. C'est un travail sans fin.

J'ai dédié le Cassio 5 à la mémoire d'Alfredo Alcala et de John Buscema pour leur travail dans "Savage Sword of Conan"; notamment pour les épisodes "The Haunters of Castle Crimson" et "The Slithering Shadow" parus en 1977. C'est bien eux qui me donnaient le plus envie de dessiner quand j'avais 10 ans, dans mon lointain Chili.
Même si j'aime plein d'autres auteurs, c'est bien ces deux-là qui restent... envers et contre tout.

                                                                                                                                                                 © Marvel      
Planche extraite de l'édition originale "The Slithering Shadow"- Savage Sword of Conan volume 20 juillet 1977.

Pour ceux que ça intéresse:
La meilleure version est l'originale, fascicule de juillet 1977, le même mois que la sortie de Star Wars au cinéma américain. Cette histoire et la plupart des travaux Buscema-Alcala sont présentes dans les reéditions de Dark Horse "Savage Sword of Conan -Volume 2". Le format est plus petit que dans les fascicules originaux et il y a une légère perte des traits les plus fins... mais c'est bien.
En français, les éditions Lug des 70' respectent la finesse du trait d'Alcala mais sont une honte car les planches des différentes histoires ont été expurgées de scènes de violence, de sang, parfois même de certains personnages poussant certaines scènes à la limite de la stupidité. Les édition Soleil ont gardé le dessin original mais le papier buvard utilisé rend le trait grossier et les hachures fines d'Alcala deviennent des masses noires informes...